L’organisme réclame plus d’un million d’euros de réparation à une nonagénaire vivant sous le smic.
Lettre ouverte à M. Luc Berthoud, président de l’OPAC de Savoie
Monsieur le Président,
Permettez moi d’en appeler ici à votre bienveillance ainsi qu’à votre sens de l’honneur et de la justice, toutes qualités dont vous êtes naturellement paré, vous qui gérez avec conscience et rigueur cette chère ville de La Motte-Servolex.
L’origine des faits dont je vais vous entretenir remonte à l’année 2019, soit deux ans avant que vous ne preniez les commandes de l’Office public d’aménagement et de construction (OPAC) de la Savoie.
En 2019, répondant à une démarche du maire de Voglans qui souhaitait, uniquement pour des motifs louables cela s’entend, agrandir le parc urbain de cette commune rurale, l’OPAC projetait de créer un parc de logements sociaux sur les hauteurs de la commune.
Outre que l’idée de vouloir créer des logements sociaux dans une zone désertée par les transports publics et les commerces pouvait paraître incongrue, l’implantation du projet semblait non seulement perturber l’environnement mais aussi déborder sur des propriétés foncières voisines.
Et notamment sur un coin de vigne amoureusement entretenu depuis des générations par la famille Girardin.
Estimant que le projet de l’OPAC empiétait sur sa parcelle viticole et menaçait l'usage du chemin qui y donnait accès, Madame Suzanne Girardin, âgée aujourd’hui de 90 ans, n’ayant pas été écoutée par les dirigeants qui vous précédaient, avait introduit, à ses frais, un recours devant la justice administrative.
Bien que tous les éléments aujourd’hui en ma possession paraissaient démontrer la légitimité de cette démarche, les juges administratifs, peut-être au seul vu de la complexité du dossier, n’avaient pas donné raison à Madame Girardin.
Les dits juges s’étaient toutefois bien gardés de juger que sa démarche était abusive.
Bref, la gentille nonagénaire, bien que ressentant un fort sentiment de tristesse à l’idée de voir sa vigne plus que centenaire être menacée par un environnement de béton, avait fini par accepter, dura lex, sed lex, sa défaite.
L’affaire aurait pu en rester là. Mais non…
Voilà que Madame Suzanne Girardin vient de recevoir de la part de l’OPAC une sommation à se présenter devant le tribunal civil de Chambéry le 22 mai prochain. Estimant, contrairement aux premiers juges, que la démarche de la nonagénaire était abusive et l’a empêché de mener à bien la construction du parc de logements, l’OPAC lui réclame le versement de dommages et intérêts à hauteur, vous allez rire, de un million cent cinquante six mille euros, je vous passe les cents.
Oui, devant l’énormité de la demande vous allez peut-être rire. Toutefois ce n’est pas le cas de la pauvre dame dont le revenu mensuel reste très loin du smic. Vous n’imaginez pas dans quel état de dépression cette menace l’a plongée.
Bon, maintenant abordons autrement le fond de l'affaire.
Primo rien ne démontre à ce stade, et surtout pas l'OPAC, que la démarche de Mme Girardin était abusive. C'est pourtant la condition sine qua non à la réussite de votre démarche.
Secundo, rien n'a jamais empêché l’OPAC d’engager les travaux dès 2021 en dépit d’un recours qui n’était pas du tout suspensif.
Tertio, rien n’empêchait non plus l’OPAC, faisant à la fois amende honorable et oeuvre de pacification, de décaler de quelques mètres l’impact du lotissement prévu, épargnant ainsi la propriété privée voisine de Mme Girardin.
Enfin, quarto, ma longue expérience devant les tribunaux me conduit à penser que l’OPAC ne trouvera jamais des magistrats sérieux qui suivront l’OPAC dans son délire et condamneront cette brave et vieille personne à vous verser une telle somme dans de telles conditions.
Bref j’en arrive à ma conclusion.
Soit la portée et les éventuelles conséquences morales et financières de cette démarche en justice vous ont échappé.
Soit votre recours est juste une manière, pas très élégante à mes yeux, de remettre un peu de pression sur cette brave nonagénaire. Une dame respectable dont le principal tort serait d’être la mère d’un opposant notoire aux abus de toutes sortes commis par des dirigeants qui se croient au-dessus de tout.
Quelles que soient les vraies motivations de cette action en justice, j’ose espérer que ma démarche retiendra toute votre attention.
A vous lire.
Jacques Girard
Poste scriptum: naturellement ce journal en ligne s'engage à publier in extenso la réponse ou les précisions que le président de l'OPAC pourrait adresser à l'auteur de la lettre ouverte ci-dessus.