Voici le genre de nouvelles que les habitants de la Côte d'Opale, dans le Pas de Calais, doivent assumer régulièrement depuis des lustres:
Des migrants qui ont cru au miracle, qui ont traversé bien des embûches et qui se retrouvent perdus sur les rivages de la Manche avec, par beau temps, les falaises de la Blanche Albion qui semblent leur sourire, là-bas, de l'autre côté de la mer, ils sont des milliers sur la Côte d'Opale.
Les habitants, les riverains, les touristes, les croisent souvent. Ils sont reconnaissables à leurs habits qui ne sont pas faits pour cette région ni pour les températures actuelles. Ils errent par centaines près de la côte dans l'espoir d'un embarquement pour l'Angleterre.
Ils portent sur leur visage tous les stigmates de la misère du monde. Ils ont dans les yeux cette détermination de ceux qui n'ont plus rien à perdre.
Certains ont déjà intérieurement admis qu'ils ne se seraient jamais lancés dans pareille aventure si, là-bas dans leur lointaine Afrique, ils avaient su ce qui les attendaient ici. Mais il est trop tard pour reculer, si près de ce qu'ils imaginaient être le but.
Alors ils prennent tous les risques. Ils embarquent à vingt ou davantage sur un canot pneumatique destinés à emporter quatre personnes sur des eaux calmes. Et à la première vague un peu plus grosse que les autres, ils se retrouvent dans une eau à cinq ou six degrés. Certains survivent et parviennent à regagner la plage. D'autres ont moins de chance. Cela fera quelques lignes dans le journal local. Un petit moment de compassion. Et la même scène se renouvellera dans quelques jours. Comble de tristesse, ces gens n'ont plus d'identité, plus de nom, plus d'histoire. Ils s'appellent tous "Migrant". Personne n'assistera à leurs funérailles.
Dans ces instants tragiques nous sommes nombreux à penser que si on les avait renvoyés chez eux avant même qu'ils mettent le pied sur notre continent, ces jeunes gens qu'un autre avenir attendait ailleurs seraient encore en vie dans le pays qui était le leur.
Nous sommes nombreux à penser que les politiciens qui laissent entrer ces gens chez nous, tout en sachant que l'on ne pourra rien leur offrir de ce qu'ils attendent, sont les responsables de leurs malheurs.
Quand par un froid matin de janvier, on découvre sur une plage les corps et les effets de ces jeunes gens qui ont cru aux promesses d'un avenir meilleur, quand demain on en rencontrera d'autres, encore vivants ceux-là, qui seront prêts à tenter l'aventure, on ne peut s'empêcher de penser à la responsabilité de ceux qui les ont laissés se jeter dans ce piège.
L'enfer est pavé de fausses bonnes intentions.
Depuis la côte d'Opale en ce dimanche 14 janvier
Jacques Girard
Pour sourire un peu en ces temps de tristesse Ne manquez pas de jeter un oeil sur notre rubrique Ma Chronique macronique en haut à droite de la page de garde